La danse des Gallinacés

Si les combats de coqs sont interdits en Métropole, en Guadeloupe et plus généralement les DOM (Département d’Outre-Mer) ont su justifier d’une tradition si bien ancrée qu’ils avaient obtenu une dérogation. Depuis peu, le Conseil Constitutionnel a donné son avis définitif pour que cette traidition continue dans l’île. Introduite aux Antilles par les colons espagnols, cette tradition s’est perpétuée pour devenir aussi populaire que le Tour de France ou les courses de chevaux. Ces combats se déroulent durant la saison sèche (de novembre aà avril) au sein des “pitts” de petites arènes où les spectateurs se tassent pour assister et miser des sommes élevées sur des coqs qui s’affrontent jusqu’à la mort.

Cocoricooooo ! Si vous passez du côté de Morne-à-l’Eau, section Espérance (RN5) et que vous voyez sur le bord du trottoir de nombreuses voitures, arrêtez-vous au Pitt de Bélair – cette arène dédiée aux combats de gallinacés. Au bout de la petite allée, celui de Mme Dolorès appartient à la catégorie dite touristique.

Quand les premiers visiteurs arrivent, le bruit résonne sous la toiture. Al’intérieure, tout se passe comme dans une ambiance d’indifférence. Les gradins sont encore vides, à part quelques vieux, envieux de leurs places de choix : le premier rang. Dans le cercle, les “coqueleux” (propriétaire de coqs) attendent avec patience leur tour pour la pesée. Combattant et vigoureux, léger, l’éleveur a déja enlèvé presque la totalité des plumes, excepté les ailes et la queue “C’est pour éviter la surchauffe des corps durant le combat” nous dit un éleveur.

Discrétion et gros sous
Au fur et à mesure que la tribune se remplit, de haut en bas on se ragarde, on se ranconte des histoires – mais ça parle coqs et c’est bien là la clé de cette société secrète : le langage, le lexique. Des mots fusent, un vocabulaire connu des pros mais inaccessible à nos oreilles profanes. Ces mots ou phrases qui reviennent souvent : coups d’zaile gauche, coup d’blanc porté, du bec douvan,  Autour de la petite table, la première rencontre s’organise : pose des ergots, cérémonie de rinçage...(voir plus bas). En créole, les représentants de chaque camp exhortent les parieurs. L’euro s’échange, beaucoup de billets, quelquefois cela peut aller jusqu’à 1000 euros sur un coq. Le gagant évidemment gagne le double de sa mise. Certaines mauvaises langues vont jusqu’à dire que certains éleveurs ont même jouer jusqu’à perdre leur maison. L’éleveur excite son coq pour le rendre le plus agressif possible, d’autres peuvent aussi s’adonner à des pratiques rituels pour attirer la chance : coup sur le bec, pincement des ailes... L’excitation monte, les visages se crispent de plus en plus. Toujours dans le cercle, la table rentrée, les portes fermées, les coqs sont face-à-face. L’arbitre et le chronométreur observent et c’est parti !

A ce moment précis, tous les coups sont permis. Est déclaré vaincu celui qui restera à terre, coucher, plus d’une minute ou qui s’enfuira deux fois de suite....Un combat sans pitié, coups de bec dans la tête...une fois terminée, l’éleveur, le visage souriant ou triste, c’est qu’il a gagné ou perdu. Et perdre un coq signifie qu’on perd de l’argent mais aussi plusieurs mois de labeurs. Au-delà de l’apparente sauvagerie de cette manifestation, l’atmosphère étrange du pitt, ses cris et ses paris, ses élans passionnels sont assez fascinants.

Préparatifs
Les coqs, tels de véritables sportifs sont sélectionnés, préparés pour ce genre de compétition : régime alimentaire à base d’avoine, de maîs, d’huile de foie de morue, de fruits, de boulettes de jaune d’oeuf roulés dans du poivre, énivré de tafia, l’animal devient agressif...et de secrets jalousement gardés par les entraineurs. L’entretien physique n’est pas oublié : massage, bain de soleil, footing. Avant de participer à un combat, les coqs sont également préparés : crête rasée, ventre et cuisses déplumées, puis ils sont pesés avant de recevoir des éperons d’acier placés sur leurs pattes. Le duel alors peut commencer entre les volatils : soutenus par des cris de leurs manageurs, excités par les clochettes et les jurons du public, en moins de dix minutes le sang coule. Le coq sortant vainqueur de l’épreuve participe à la notoriété de l’éleveur.

L’origine des coqs des îles
Le coq des îles n’a rien à voir avec celui des gros coqs des basses-cours en Europe. Plus léger, nerveux, il est plus rapide et résistant. Son origine vient des coqs de Bankiva, une espèce qui existe depuis plusieurs siècles dans le nord de l’Inde. Sauvage, il vit parmi les poules et ne tolèrent aucune concurrence. Agressif envers le mâle d’une même espèce, il attaque tous ceux qui s’approche de son harem ou menace son territoir. Il se bat pour gagner ou mourir. Aujourd’hui encore, son approvisonnement reste partiel et son comportement dans le cercle correspond à son caractère naturel.

Contact : Dolorès
Section Espérance
RN5 -  97111 Morne-à-l’Eau
Tél : 0590 24 23 70
Mob : 0690 94 10 31
Programme à partir de 9 heures
Les combats de coqs sont ouverts de janvier à juillet et sont organisés 1 vendredi et 1 samedi par mois (se renseigner par téléphone)